Heure pour un peu de poésie.
Cette semaine, j’ai découvert la poétesse innu Rita Mestokosho et la poétesse française en terre innu, Laure Morali. Des presque sœurs de Joséphine Bacon. Poétesses de la forêt et de la pluie.
Comme souvent, cette littérature, limpide et envoûtante, me touche profondément. Plus encore lorsque je déchiffre les mots dans leur langue initiale. Langue innue, langue inuit, langues autochtones des territoires nordiques. Elles se ressemblent. Elles ont de commun cette vibration, minérale et lichéneuse, un quelque-chose que nos cellules reconnaissent comme essence. Sûrement que c’est un peu le cas.
Un rythme, un claquement qui transporte à chaque fois sur les ailes des oies sauvages.
A mon tour, je joue à écouter parler la pluie et la montagne Je laisse les mots venir, je leur offre, sans en chercher ni sens ni quelconque préoccupation de rendu. Je laisse venir les mots qui donnent à boire aux heures sèches.
Aujourd’hui, il pleut sur la montagne Les arbres s’en donnent à cœur joie Ils inondent la vallée d’effluves accrochés à la brume Le paysage s’élève dans un bleu immobile La puissance végétale propulse dans les bras des hêtres, et des pins
On entend à peine le torrent charrier son eau sous l’orage L’eau ne sait plus si elle vient du ciel ou de la terre
Les feuilles sortent de leur torpeur, s’élancent, attrapent les gouttes limpides qu’elles boivent goulument. La vie n’en a jamais fini d’avoir soif.
Des pieds nus dansent sur les mousses détrempées Rita frappe sur son tambour Joséphine murmure à la toundra Laure peaufine son lexique Jean Désy les entoure de sa prose protectrice Charles Sagalane les rejoins en canot depuis le lac St Jean.
Et moi je rêve, regardant par la fenêtre les volutes violettes inonder la montagne Je me fraye un chemin vers leur calme rencontre. Se retrouver, un jour, de l’autre côté de l’océan.
Je me souviens de ce voyage. Je sais bien qu’elles sont vivantes les forêts de là-bas.
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Extrait de La Terre Cet Animal :
« Quand on marche dans les aubes d’un continent vieux il arrive que des ancêtres nous bousculent en nous prenant les mains et nous tombons à genoux pour sentir le ciel dans le sol »
Extrait de ATIKU UTEI, le cœur du caribou :
« tu ne marches pas dans le vide il y a une terre qui te porte et les quatre directions t’entourent alors regarde le Nord comme ton dernier souffle garde-le pour demain tu en auras besoin »
Extrait de Née de la Pluie et de la Terre
"Je deviens l'hiver pour me reposer Je deviens le printemps pour rêver Je deviens l'été pour briller. Et je suis une femme d'automne Née dans un univers qui est aussi le tien"
Toutes les nouvelles de ces auteurs sur le site des éditions Mémoire d'encrier
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